De quoi se compose l’estime de soi ?
Définition
Le sujet de « l’estime de soi » passionne beaucoup mais reste difficile à définir. C’est pourtant l’une des dimensions les plus fondamentales de notre personnalité, bien qu’elle reste impalpable et complexe. Il est difficile de prendre conscience de ce qu’elle est réellement.
Aux Etats-Unis, où le terme a été défini pour la première fois, « self-esteem » est entré dans le langage courant.
En France, nous l’avons longtemps nommé « amour-propre« , mettant en avant une vision plus affective, voire méfiante, du rapport à soi.
Le terme « estime de soi » se veut pourtant plus objectif. Le verbe « estimer » vient du latin oestimare (évaluer), qui signifie à la fois « déterminer la valeur de » et « avoir une opinion sur« .
En somme, l’estime de soi traduit « la manière dont on se perçoit et si l’on apprécie ou non cette perception« .
Ce regard-jugement que l’on se porte est vital pour notre équilibre psychologique.
Lorsqu’il est positif, il permet d’agir sereinement et efficacement et de faire face aux difficultés.
A l’inverse, lorsqu’il est négatif, il engendre des souffrances et des perturbations qui viennent troubler notre quotidien.
Prendre le temps de travailler sur soi peut donc se révéler un travail fructueux pour améliorer l’ensemble de sa vie.
Les trois composantes de l’estime de soi L’estime de soi repose sur trois piliers :
- L’amour de soi
- La vision de soi
- La confiance en soi
Il faut que ces trois composantes soient équitablement développées pour obtenir une estime de soi harmonieuse.
Nous allons maintenant définir chacune des ces composantes :
L’amour de soi
C’est l’élément le plus important.
L’amour de soi signifie avoir la capacité de s’évaluer et de s’aimer avec ses qualités mais aussi ses défauts et ses limites, d’accepter ses échecs et ses revers. C’est avoir la certitude intérieure que nous sommes dignes d’amour et de respect.
Cet amour de soi « inconditionnel » ne varie pas en fonction d’éléments externes (comme un manque de performance, une critique).
Il nous aide à dépasser les difficultés et à nous relever de nos échecs.
Il ne nous empêche pas de ressentir des doutes, ni de la peine, mais il nous protège du désespoir.
Il se constitue en grande partie à partir de l’amour que notre famille nous a fourni enfant et de ce que Boris Cyrulnik nomme « les nourritures affectives ».
Sa carence provoque des « troubles de la personnalité », qui pousse les sujets en interaction avec les autres, à des situations d’échec ou de conflits.
S’aimer soi-même est la base de l’estime de soi. L’élément le plus profond et le plus intime.
Certaines personnes peuvent donner l’impression d’avoir une bonne estime d’eux-même socialement, sans pour autant l’avoir réellement.
Bénéfices : Stabilité affective, relations épanouissantes avec les autres et résistance aux critiques ou au rejet.
Conséquence en cas de carence : doute de ses capacité à être apprécié(e) par les autres, certitude de ne pas être à la hauteur, mauvaise image de soi même en cas de réussite.
La vision de soi
Le deuxième pilier de l’estime de soi est la vision de soi. C’est l’évaluation que l’on porte sur ses qualités et ses défauts, que ce regard soit fondé ou non. L’importance n’est pas la réalité des choses mais la conviction de détenir une qualité ou un défaut, un potentiel ou une limite. Cet avis subjectif rend son observation difficile et sa compréhension délicate.
Ainsi une personne avec une faible estime de soi sera souvent en décalage avec son entourage qui ne perçoit pas les défauts qu’elle s’attribue.
Cette faible estime de soi peut également nous empêcher de nous engager dans les projets dont nous avons envie (professionnels ou personnels).
A l’inverse, lorsqu’elle est positive, la vision de soi est une force intérieure qui nous permet d’atteindre nos objectifs malgré l’adversité.
Ce pilier est bâti par les attentes que nos parents avaient pour nous. Ils peuvent en effet projeter ce qu’ils auraient aimé accomplir et qu’il n’ont pas pu ou su réaliser. C’est ce que Boris Cyrulnik nomme « l’enfant chargé de mission ». Cette pression peut néanmoins être légitime si elle tient compte des désirs et de la capacité de l’enfant. Faute de quoi, ce projet impossible à réaliser conduira l’enfant à intérioriser son incapacité à réaliser le désir de ses parents et à plus long terme, engendre une profonde vulnérabilité de l’estime de soi.
Une vision de soi limitée peut également conduire à ne jamais oser prendre de risque et à dépendre des autres. Le sujet pourra ainsi bâtir des relations satisfaisante avec les autres, mais se limitera au rôle de « suiveur », sans prendre le risque de débuter des projets personnels.
Bénéfices : Ambitions et projets entrepris, résistance aux obstacles et aux imprévues.
Conséquence en cas de carence : manque d’audace dans ses choix existentiels, conformisme, dépendance aux avis des autres, manque de persévérance dans ses choix personnels.
La confiance en soi
Ce troisième pilier s’applique surtout à nos actes. Avoir confiance en soi se résume par la certitude que nous serons capables d’agir de manière adéquate dans des situations difficiles.
Pour pouvoir évaluer la confiance en soi, il faut observer comment la personne se comporte face à de nouvelles situations ou à des situations imprévues ou stressantes.
La confiance en soi est en quelque sorte la conséquence de l’amour de soi et de la vision de soi, mais n’en reste pas moins primordiale car l’estime de soi a besoin d’actes pour pouvoir se maintenir ou se développer.
Elle se bâtit à travers le mode éducatif que nous avons reçu par notre famille ou par l’école.
Ces derniers peuvent avoir accompagné l’enfant à intégrer que l’échec est possible mais non catastrophique, qu’il est louable d’essayer plus que d’avoir réussi, et qu’une difficulté peut nous aider à nous dépasser ou à apprendre quelque chose. Il intégrera alors qu’il faut ainsi persévérer, oser et accepter l’échec. L’enfant aura également tendance à observer la manière dont ses parents réagissent face aux difficultés, ce qui renforcera sa construction.
Ainsi le fait de ne pas redouter les situations inconnues ou l’adversité sont de bons indicateurs d’un bon niveau de confiance en soi.
Un déficite de confiance en soi ne constitue pas un handicap insurmontable mais peut conduire à l’inhibition et à éviter régulièrement de prendre des risques.
Bénéfices : capacité d’agir de manière rapide et efficace, résistance aux échecs.
Conséquence en cas de carence : Inhibitions, hésitation, abandons et manque de persévérance.
L’équilibre de l’estime de soi
Ces trois composantes sont généralement interdépendants : l’amour de soi (se respecter quoi qu’il advienne, écouter ses besoins et ses aspirations), facilite incontestablement une vision positive de soi (croire en ses capacités et se projeter dans l’avenir), qui a son tour influence favorablement la confiance en soi (agir sans crainte excessive de l’échec et du jugement d’autrui).
Lorsque ces éléments sont dissociés, l’estime de soi peut s’effondrer à cause d’un élément extérieur imprévu qui vient renforcer la fragilité déjà existante de la vision de soi.
Un adulte avec une faible vision de soi pourra également avoir le sentiment qu’il ne sera jamais à la hauteur et ce malgré une éducation « parfaite ».
D’après l’ouvrage « L’estime de soi, s’aimer pour mieux vivre avec les autres » de Christophe André et François Lelord, paru en 2011.